vendredi 30 novembre 2012

128-

Entre deux portes, il y a bien traces de quelque chose d’humain. Un genre d’appartement qui semble s’être renversé sur le trottoir. Fenêtre ouverte. Lumière trop forte d’une lampe sans abat-jour. Cartons humides empilés entre la fenêtre et la route. Je dois les contourner, ou passer en plein milieu. La scène est gravée dans ma mémoire. Je vois une ombre par-dessus une balustrade miteuse. Puis un torse nu, en cette saison. D’une blancheur affolante. Une gueule qui m’aurait effrayé une autre nuit. Mais pas ce soir.

mardi 27 novembre 2012

127-

Alors je poursuis sans but...Où les vivants, sans doute, rencontrent les morts. Comme le veut la légende. Ou la religion. Ou ma peine. Ce vide que je vois se faire autour de moi. Au sens propre, les rues sont désertes par ici. Au sens figuré, il me reste mon père. Plus une ombre qu’une présence. Et c’est tout. Je me souviens très bien, alors que la chaussée devient chaotique, à cause de travaux abandonnés, avoir senti dans mon dos un air glacé. Une main froide en fait, à même la peau. J’ai su qu’elle serait toujours là désormais. Le même sentiment qu’à l’annonce de ma maladie. Tout aussi violent. Cette chose me pousse. Elle ne me guide pas. Elle me précipite dans un trou. Celui, sans doute, où les vivants rencontrent les morts.

jeudi 22 novembre 2012

126-

Ma voiture...J’ai quitté la place sans même y penser. Du mal aussi à me souvenir comment j’y étais seulement parvenu. Une sorte de trou noir. Je l’ai garée quelque part, une image obsédante en tête. Des crocs, une gueule affreuse. Il est trop tard pour revenir sur mes pas. La récupérer, monter à bord, démarrer...Tout ça n’a plus beaucoup de sens.

vendredi 16 novembre 2012

125-


 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Alors je me souviens avoir divagué. Rejoins les artères commerçantes, m’être noyé dans cette frénésie. Mais n’y avoir trouvé aucun réconfort. Face au mur des démarches à accomplir, des larmes à affronter, érigé depuis des heures...Et ce froid, bon dieu. Ce froid qui m’envahit, à mesure que je m’enfonce dans un quartier que je connais à peine. Délaissant l’agitation pour ce calme qui déborde d’immeubles gris. Ils commencent à s’éclairer lentement. Fenêtre après fenêtre. Quelques bruits familiers finissent par m’atteindre. Je finis même par entendre des voix, et comble de la cruauté, quelques rires, qui s’échappent d’un étage.

mardi 13 novembre 2012

124-

Dont l’écho devient terrible au fur et à mesure que la journée sombre. J’ignore comment je vais survivre à cette soirée. La première sans elle. J’ignore comment je vais m’arracher à la rue. L’heure n’a plus la moindre importance. Gravée dans ma mémoire, la cicatrice de ces moments, elle court toujours à vif. Rentrer dans notre appartement me semble impensable.

vendredi 9 novembre 2012

123-

C’est le corps que je cherche, et sa voix. Tout autour de moi, alors que je m’écarte de personnes aux visages graves ou souriants. Je me raccroche à n’importe quoi. A n’importe quelle sensation. Une odeur, un bruit...Je dois pourtant me résoudre. Aux curieux se joignent à présent les résidents de la place, ils rentrent chez eux, des employés qui sortent de leur travail. Dans le soleil tombant, la fraîcheur automnale. Le pur effroi de la scène de crime disparaît peu à peu. Au profit d’un décor apaisé. Les véhicules de police sont partis. Il reste encore ce carré horrible, avec une bâche. A peine protégé désormais. Il reste encore mon désir brûlant d’en finir. Criblé par l’horreur de son absence.

vendredi 2 novembre 2012

122-

Je dois me résoudre à ne plus la voir. C’est par ces mots que je commence ma nuit. Je dois quitter cet endroit, et vite. Mes mains tremblent...Ce n’est pas la fatigue, la détresse ou la peur. Plutôt l’excitation malsaine du tueur. Comme si, à travers moi, il voyait le spectacle d’une mort abjecte. Fosse commune, là, au milieu de la place. Tout juste humanisée par le doux balancement des arbres.