Je regrette les instants mourants que nous avons
partagés. Cette nuit, comme suspendue, les
cent mètres de cette rue, les maigres indices d’une survie échangée...La
sienne contre la mienne. Sa voix contre mes yeux...Tous les corps transpercés
contre un seul, celui de Céline. Il me fait comprendre qu’il en a entendu
parler...De ce massacre. Qu’une rumeur court dans le quartier. Comme quoi le
visage de la victime aurait disparu. Il
m’a écrit tout cela, très vite, une écriture fine et précise. Pas du tout
affectée par l’alcool. Ou blessée par les impacts de la guerre. J’ai conservé
ce papier, les phrases déposées dessus comme des éclats de voix.