lundi 16 avril 2012

72-


Les nuits passent et s’épuisent. Grâce à ces notes je restructure mon existence. Le temps signifie à nouveau quelque chose. C’est une routine difficile, qui croise un cortège d’angoisses...Les soins, les activités, les consultations ne sont que des prothèses de mauvaise qualité. Elles me permettent, malgré tout, de tenir bon, de poursuivre le récit...

Nous sommes à présent debout dans cette pièce. Elle m’est devenue soudain insupportable. Je deviens agressif. Alors que les circonstances auraient, peut-être, dû me tétaniser. Ce n’est pas ce qui s’est produit...

Voilà pourquoi je crains “l’épisode” de l’Institut médico-légal. J’ai peur de briser les pauvres liens que j’ai retissés avec la réalité. Le peu de force que j’ai reconquis.

- “Vous allez me demander ce que j’ai fait la nuit dernière, n’est-ce-pas ?”...

Le lieutenant Darc me regarde, éberlué.

- “Votre question m’étonne Monsieur Cabon...Je ne crois pas avoir été ambigu avec vous...Maintenant, si vous y tenez...Où étiez-vous cette nuit, alors que votre femme était seule dans la rue ?

Il saisit un dossier, qu’il manipule méchamment.

- “J’ai bu toute la nuit, en ville, et je me suis endormi dans ma voiture”.

Darc note ma déclaration sur un carnet Rhodia.

- “Bien...Il faudra nous fournir des lieux, des adresses précises pour les vérifications...Allons-y maintenant...”.

Dans le couloir, des sonneries de téléphone, les voix qui s’élèvent. Tout ça accentue une affreuse migraine.