vendredi 24 février 2012

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Notre restaurant, c’est-à-dire celui dans lequel nous avions nos habitudes, a fermé depuis quelques mois. Son patron est mort d’un cancer. Les locaux sont restés inoccupés. Puis des travaux ont démarré il y a plusieurs semaines. La devanture est achevée depuis hier. Seule la présence de Xavier me retient de ne pas foutre le camp. Dans ce nom, il y a tout ce que je n’arrive plus à contrôler.

Lorsque Xavier me le montre, en précisant que nous allons peut-être en faire notre future cantine, j’hésite à remonter dans la voiture. Mais après l’esclandre de la veille, ce geste risquerait de me coûter cher. Nous sommes associés, et cette association est une chaîne à mon pied. Depuis un mois, je n’ai plus les mêmes priorités que mes collègues. J’ignore s’ils s’en sont rendus compte ou bien...Mais c’est ainsi.

Les charges financières, les contraintes sont lourdes. Trop lourdes pour un homme dont la vue est en sursis. Un malaise que l’on qualifierait trop rapidement de dépression. Je suis dans un souterrain. Je donne le change, avec des failles et des manques. La passion a changé de visage. Un faciès plus rude, et plus ambigu. Comme un visage abîmé par l’acide et les addictions.